IA générative: ChatGPT et Bard vont-ils révolutionner nos métiers ?

Intelligence Artificielle : ChapGPT, Bard et les impacts sur nos métiers

Il faut bien l’avouer, OpenAI a frappé un grand coup le 30 novembre 2022, en ouvrant l’accès au grand public à son agent conversationnel ChatGPT. Il s’en est suivi un déferlement d’articles et de chroniques TV sur le sujet, à en donner le tournis !

Mais pour qui suit les actualités du digital, l’avènement de ces technologies était annoncé pour être prochain. En janvier, l’emballement s’est accéléré avec des annonces de grands acteurs du web sur le sujet (Microsoft, Google).

Ce qui est sûr : c’est que cela aura des impacts sur nos vies, positifs et négatifs, qu’il faut anticiper et maîtriser. Comme toute nouveauté, il faut aussi savoir en profiter et en exploiter tous les bénéfices. Alors, comment participer à cet élan ?

L’offensive OpenAI (ChatGPT /DALL-E)

Le 30 novembre 2022, OpenAI ouvre enfin l’accès à son robot conversationnel ChatGPT. Celui-ci avait fait l’objet d’un teasing important les mois précédents, et surtout d’un lourd travail interne afin de le fiabiliser et contenir les biais. Le modèle a en effet été entraîné pendant de longs mois à partir d’une copie du web (scrap de sites de confiance), testé sur une multitude de questions dont les réponses ont été supervisées par les humains pour limiter les biais à connotations sexistes, racistes, sexuels, etc.

L’affaire était donc rondement menée côté orchestration médiatique, avec en cible la prise de participation de Microsoft quelques semaines après (janvier) et même son intégration au sein du moteur de recherche maison Bing (dans un premier temps aux US uniquement). Il est néanmoins possible de tromper le modèle avec des questions loufoques, OpenAI promet des améliorations sur ce sujet dans ChatGPT 4.

Du coup, tout le monde s’est mis à essayer ChatGPT, y compris les journalistes, de quoi inquiéter tout un chacun sur l’impact de ces innovations sur son propre métier, à commencer par les journalistes.

Pourquoi ce nouveau modèle d’AI a tant déchaîné les foules ? Voici les principales raisons :

  • Simplicité de l’interface et rapidité d’exécution (UX) : un prompt, un contexte et bing, on soumet sa demande, la réponse vient quelques secondes ensuite.
  • Intelligence relative : le ChatBot garde en mémoire les échanges et les questions précédentes, pour enrichir ses réponses. Mais à la base, il est bien entraîné sur des notions d’occurences statistiques, cela reste une machine, l’intelligence est relative.
    • GPT = Generative Pre-trained Transformer. C’est un système entraîné qui repose sur des calculs statistiques effectués sur une grande masse de données et de contextes agrégés. Il détecte les séquences de données récurrentes du langage humain.
    • Il n’est pas doué de conscience, n’est pas capable d’observer comme un humain, il n’a pas d’intention, pas de raisonnement, pas d’idées.
    • La machine est capable d’effectuer des choses répétitives encodées, mais a plus de mal à percevoir notre monde, si il n’y a pas d’antériorité.
  • Qualité des informations restituées (dans un style littéraire impeccable)
  • Possibilité de tester gratuitement (dans la limite d’un plafond monétaire offert) ont accéléré la diffusion de ces nouvelles, sur fond de Fascination et d’Inquiétude.

En janvier 2023, ChatGPT a été interrogé 100 millions de fois, ce qui en fait le service numérique dont le démarrage a été le plus rapide de l’histoire (mieux que Facebook !).

L’ampleur du phénomène auprès du grand public, largement accélérée par les nombreux articles de presse, a entraîné la réaction rapide de Google, le leader du Search Marketing, qui annoncé le déploiement prochain de son propre agent (voir ci-dessous).

Microsoft a embrayé en janvier avec 2 nouvelles : son moteur de recherche Bing intègre déjà au Etats-Unis ChatGPT, et ces technologies seront intégrées prochainement à Teams, MS Office, Windows11 et son offre cloud Azure ( MS Copilot)

A noter que MS avait investi 1 Milliards de dollars en 2019 déjà dans le projet OpenAI (mettant notamment à disposition ses supercalculateurs et centres de donées), et a récidivé en janvier 2023 avec un accord pluriannuel de 10 Milliards.

A noter :

  • OpenAI propose différents algorithmes novateurs :
    • ChatGPT, l’agent conversationnel, qui repose pour l’instant sur sa version 3.5
    • DALL-E, la conversion texte vers image
    • Codex (GitHub Copilot X) : la génération de code
    • Whisper AI : la conversion voix vers texte
  • La mission de l’entreprise OpenAI est officiellement de veiller à ce que l’intelligence générale artificielle (AGI) profite à l’ensemble de l’humanité ! AGI signifiant des systèmes d’IA plus intelligents que les humains en général.

Pourquoi l’IA est trendy début 2023 ?

Tout d’abord en raison d’innovations algorithmiques :

  • De talentueux chercheurs se sont penché sur le sujet des NLU (Natural Language Undestanding), NLP (Naturel Langage Processing), NLG (Natural Language Generation) et LLM (Large Language Model)
  • Des modèles avec plusieurs centaines de milliards de paramètres ont été développés, qui permettent de proposer de véritables agents conversationnels qui prennent en compte les éléments contextuels : le modèle peut se spécialiser et s’améliorer contextuellement, il n’est plus seulement une machine à générer du texte
  • Ces modèles sont largement disponibles et utilisables facilement
  • Les outils de benchmark, stress test et d’analyse des modèles ont été améliorés, y compris sur l’entraînement des modèles (ex: GLUE Benchmark)
  • Les investisseurs pensent avoir trouvé une rupture technologique vecteur de croissance, comme l’ont été l’avènement d’internet puis le mobile (OpenAI est valorisée à environ 30 milliards de dollars)

Ensuite en raison des nouveautés technologiques sur le hardware. Des puces puissantes ont été mises sur le marché, la première d’entre elles en terme de part de marché étant l’A100 de NVidia, disponible sous forme de bundle hardware surpuissant agrégeant 8 exemplaires (DGX A100). De quoi satisfaire le soif de réponse des nouveaux moteurs d’intelligence artificielle, grâce à leur puissance de calcul phénoménale.

La réponse Google Bard

Les dirigeants fondateurs de Google – Larry Page et Sergey Brin – ont été rappelés à rescousse, l’entreprise percevant un risque de concurrence accrue voir d’éviction du marché, à tout du moins d’impact lourd sur son modèle économique. Google a rapidement sorti un communiqué (début février) :

  • Rappelant que sa filiale DeepMind travaille depuis plusieurs années sur le sujet, notamment sur une IA conversationnelle LaMDA.
  • Indiquant qu’une version simplifiée de LaMDA sortirait bientôt, appelée Bard, permettant à Google de la déployer à large échelle et qu’elle serait en tant utile disponible dans son moteur de recherche, après une phase de test auprès d’un public ciblé, notamment pour en contenir les dérives et garantir une information de qualité.
  • Soufflant que ces nouvelles technologies seront intégrées rapidement aux outils maison (Gmail, Google Docs, Google Cloud, etc.)

Bref, cette réaction du leader du Search sous entend que l’année 2023 sera charnière pour les moteurs de recherche et nos métiers !

Les autres applications AI

Voici les autres algorithmes d’Intelligence Artificielle qui ont émergé ces dernières années et qui sont à suivre sur les mois qui viennent :

  • Stable diffusion : génération image
  • You.com : moteur de recherche
  • Midjourney (accessible depuis Discord), le concurrent de DALL-E
  • Character.ai, créé par des anciens de Google et qui permet de converser avec des personnages célèbres
  • OPT (Meta)
  • LLaMA – Large Language Model Meta AI (Meta)
  • Prometheus (Microsoft)
  • GPT-Neox (Euleuther)
  • Bloom (Amazon / Hugging Face)
  • Ernie (Baidu)

Elon Musk a même annoncé travailler à une alternative moins « woke » à ChatGPT, qui a été entraîné pour ne pas laisser passer des questions insidieuses.

Les 4 Enjeux de l’IA

La vague de l’IA a rapidement mis les passionnés en émoi, notamment sur les sujets suivants :

  • Nécessité de légiférer et protéger des dérives : cela tombe bien, l’Europe est en train de finaliser une directive sur la responsabilité de créateurs d’algorithme d’IA, de quoi faire émerger quelques règles éthiques et d’engagement de transparence
  • Émergences de nouveaux monopoles, ces technologies étant très coûteuses et basées sur des bases de données contextuelles servant de base de vérité. Comment seront défendus les droits d’auteur ? Qui décidera de ce qui est vrai ?
  • Mutation des métiers et du monde du travail :
    • Dans un premier temps tous les métiers basés sur les sciences de l’information seront touchés (journaliste, éducation, écrivain, juristes, traducteurs, comptables, contrôleurs financiers, consultants, ingénieurs, etc.), ceux associés à la créativité (design graphisme, video making, développement informatique), et donc ceux du digital (copyrighting, marketing, coding, SEO). Bref, les métiers les plus à risques sont les métiers à très haute qualification !
    • Ensuite, toutes les solutions logicielles incorporeront une dose d’IA pour simplifier les taches répétitives. Donc tous les travailleurs seront impactés
    • Et on n’est pas loin du robot conversationnel domestique…
    • Bref, les professions intellectuelles seront lourdement impactées !
  • Émergence de nouvelles innovations suite à ce saut technologique
    • De nouvelles possibilités s’offrent à nous, il va falloir s’adapter et monter en valeur ajoutée

La position de Google sur les contenus générés par l’IA

Bien sûr toute la chaîne de production du web sera impactée, et donc tous les métiers du marketing et informatiques (designer, développeurs web, rédacteur, photographe, etc. et bien sûr les référenceurs). D’ailleurs plusieurs applications du marché ont déjà incorporé dans leur interface une dose d’AI : Adobe (Firefly), Figma, etc.

Du coup Google s’est empressé de rappeler sa position en ce qui concerne les textes générés par les outils comme ChatGPT :

  • Seule la qualité des textes compte, peu important comment ceux-ci ont été générés (cf le concept EEAT expertise expérience, autorité, fiabilité). Ils sont donc autorisés, à partir du moment où ils aident à créer du contenu de qualité.
  • Ses algorithmes sont déjà capables de détecter les contenus générés lorsque ceux ci ont pour objectif de manipuler le classement dans les résultats de recherche (ex: son outil SpamBrain basé sur l’IA dédié antispam)

Au delà, cela va renforcer le positionnement moteur de réponse de Google. Pour répondre rapidement à l’internaute et son intention, Google va devoir garantir plusieurs choses tout en protégeant son modèle économique :

  • Une réponse exacte et qualifiée. Un beau challenge pour son moteur de recherche, ses équipes, et pour les contenus de nos sites.
  • Le respect des droits d’auteur (créditer les sites). Un beau challenge pour le législateur
  • Le respect des législations à venir

En conclusion

Pour résumer, ChatGPT a mis un pied de la fourmilière et secoué le géant Google, qui travaillait en sourdine sur le sujet depuis plusieurs années :

  • Ces nouveaux algorithmes sont basés sur une base de donnée pré-chargée. Ils ne sont pas encore intelligents, ils sont surtou moins bêtes qu’avant. Ils font des corrélations entre différentes sources de données dites de confiance, en grande quantité, pour en déduire, grâce aux progrès des puissances de calcul des serveurs, une réponse qu’il estime être la bonne. Il existe des biais (de raisonnement) dans lesquels ils peuvent tomber.
  • La mise à disposition de ces ChatBot évolués va permettre à chacun des modèles de s’améliorer rapidement grâce à notre concours (si l’on réfléchit bien, nos utilisations gratuites permettent d’entraîner le modèle, pour pas cher !) :
    • Rapidement différents modèles entraînés vont se faire concurrence et pourront progressivement être mis à jour plus fréquemment avec des données courants.
    • ChatGPT, Bard & Cie vont bientôt être disponibles sous forme d’applications mobiles, et donc se démocratiser à large échelle
    • Des versions multi-modales (permettant de générer du texte,mais aussi du multi-média) sont déjà là, ChatGPT4 annonce déjà apporter des nouveautés sur ce point
    • La mise en boite dans un robot conversationnel n’est plus très loin. Reste à améliorer les algorithmes de prise de décision. R2D2 se rapproche !
  • Nos gestes quotidiens et nos métiers bien sûr vont être impactés : la recherche d’information, mais aussi la conduite autonome, les logiciels, etc. L’interface homme machine va faire un grand bon en avant, il y a un enjeu d’accompagnement et de formation sur ces sujets
  • Nous allons devoir cultiver & aiguiser notre sens critique : arriverons-nous à distinguer ce qui est naturel de ce qui est généré par un modèle algorithmique ? L’enjeu pour ces outils sera de nous rassurer. Et sûrement de nous informer si les contenus ont été auto-générés par une AI (pour réduire les risques de plagiat ou de fausses informations ou infox, notamment lors d’élections – cf les deep-fakes vidéo de Tom Cruise et Barack Obama qui datent déjà de plusieurs années ). Cela pose des enjeux éthiques évidents et de détection des manipulations.
  • Ces nouveaux outils / algorithmes devront veiller à apporter de la confiance et être transparents (quelles sont les sources de données sous-jacente aux LLM, quelle fraîcheur de donnés, etc.), afin de permettre l’exercice de notre sens critique. Nul doute que les règlementations à venir (Europe + USA) impliqueront de nouvelle exigences sur ce point
  • Difficile de dire quand la machine sera à niveau de l’homme. Certains indiquent que disposer d’une AGI (Artificial general intelligence ie. l’IA Forte, capable d’effectuer n’importe quelle tâche dont un humain est capable, disposant de capacités cognitives similaires à l’humain), sera déjà possible d’ici 2030/2040…

En attendant, ces outils NLU ouvrent de nouvelles perspectives :

  • Il nous faut les dompter, apprécier les gains de productivité qu’ils peuvent apporter, participer à leur démocratisation. De quoi comprendre comment vont évoluer les moteurs de recherche et anticiper les impacts sur la visibilité de nos sites web. A tester sans modération, pour en profiter et tirer des bénéfices ! Nous on a déjà commencé…
  • De nouveaux métiers vont apparaitre (les utilisateurs sont déjà perdus), et certains métiers du digital vont être simplifiés (grâce à l’arrivée de nouveaux logiciels). Le challenge sera de bien utiliser ces nouvelles possibilités, afin d’être créatif / original, et d’accompagner nos clients (formation, conseil, coaching, etc.)
  • « Les rois du pétrole » seront ceux disposant de bases de données qualifiées, constituant un contexte fiable, à partir duquel l’algorithme sera efficace (ex: dans la santé des sites comme PasseportSanté, Doctissimo ayant depuis longtemps travaillé à la fiabilité de leurs conseils sont bien positionnés), ou encore les ceux créant des contenus apportant une vraie réflexion ou opinion sur un sujet (aujourd’hui l’AI est douée sur l’information encyclopédique, moins pour le sens aigüe de la synthèse / projection / anticipation nécessitant un raisonnement pas uniquement basé sur le passé statistique). Non les rédacteurs ou écrivains ne sont pas morts, le content marketing a encore a place !
  • Ce n’est que le début !
    • On attend ChatGPT 4 qui est annoncé pour mi-février 2023 (annonce Microsoft), qui embarquera sans nul doute plusieurs belles surprises et des capacités démultipliées
    • Les autres acteurs du marché ne vont pas rester les bras croisés. Le potentiel de croissance de ce marché est phénoménal.
      • Shopify a ainsi déjà testé l’API d’OpenAI dans sa marketplace grand public Shop, afin d’améliorer les produits recommandés à l’internaute, en fonction de ses requêtes de recherche, de la page courante et de la base produit du site. Elle sera proposée dans les prochains mois à son application phare.
      • Des plugins sont dore et déjà disponible sur WordPress / WooCommerce, Prestshop, Magento Adobe eCommerce, etc.
      • La startup Humane, fondée par d’anciens cadres de Apple, fait parler d’elle, après avoir effectuée plusieurs levée de fonds, et obtenu des participations d’acteurs prestigieux (Microsoft, OpenAI / Sam Altman, Qualcomm, LG, Volvo, etc.), sur fond de produit mystérieux…
    • Google travaille déjà sur les robots domestiques et industriels
      • Sa filiale dédiée (Everyday Robots) exploite déjà les possibilités de son modèle de language PaLM, en alliant robotique et modèle de conversation chatbot.
      • Google AI travaille sur de nouvelles méthodes afin de faciliter l’apprentissage par les robots de leurs taches à effectuer (cf projet CaP Code as Policies). Un code Python est généré en fonction de commandes écrites en langage naturel) et d’un simple exemple, ce qui permet ensuite au robot d’effectuer les tâches demandées pour lesquelles il n’avait pas été destiné au départ. Utile pour la mise en œuvre de robots dans l’industrie !

Bref, ces nouveautés technologiques ouvrent des perspectives nombreuses, les décennies qui arrivent seront durablement impactées. Il faut saisir la balle au bond pour dompter / digérer ces technologies émergentes et augmenter notre créativité. Stay tuned…